« Ne pas avoir honte de dire "aujourd’hui je ne peux pas mais demain je ferai mieux" »
Pauline a créé sa propre marque de thés et d’infusions pour soulager les douleurs provoquées par l’endométriose dont elle est elle-même atteinte. Après plusieurs petits boulots, elle a choisi de devenir entrepreneure. La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) lui a permis de faire une demande d’aide financière à la création d’entreprise auprès de l’Agefiph.
Elle nous raconte son parcours…
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre expérience de vie de la maladie en quelques mots ?
Je m'appelle Pauline Castillo, j'ai 34 ans, maman d'un petit garçon, je vis dans le Sud de la France. Je suis à la tête de ma propre entreprise depuis 2018, j'ai créé ma propre marque de thés et d'infusions bien-être : Niwa Tea.
J'ai découvert que j'étais atteinte d'endométriose à l'âge de 16 ans. Cela faisait déjà quatre ans que je souffrais énormément et mes parents m'ont amené voir beaucoup de spécialistes avant que le verdict ne tombe. J'ai ressenti un coup de massue et un léger soulagement de savoir enfin ce qui m'arrivait, non ce n'était pas dans ma tête mais bien un mal qui rongeait mes ovaires.
Comment conciliez-vous votre maladie et le travail ?
J'ai très vite compris que je ne pourrais pas avoir un travail conventionnel, les horaires de travail, les jours bien précis ne sont pas fait pour une personne qui peut se coucher en pleine forme et se réveiller dans l'incapacité de mettre un pied à terre. J'ai fait quelques petits jobs (restauration rapide, vendeuse de chaussures...) mais cela ne me convenait pas et j'étais extrêmement fatiguée. J'ai également découvert le vrai visage de certains chefs d'entreprise face à une employée qui n'arrive pas forcément à suivre le rythme. J'ai donc décidé de devenir mon propre patron et de travailler pour moi.
Pendant dix ans j'ai été photographe évènementiel puis j'ai repris mes études dans la diététique et c'est comme ça que je suis tombée amoureuse des plantes et que l'idée de Niwa Tea a germé.
En choisissant d'être chef d'entreprise j'ai pu concilier ma maladie et mon emploi. Si un jour je suis incapable de faire une tâche je ne la laisse pas me ronger et je la reporte. Et les jours où je me sens bien, j'en fais le double. Voila mon équilibre.
Qu’est-ce qui vous a aidée ?
Ce qui m'a beaucoup aidée d'un point de vue psychologique, c'est de faire le processus d'un deuil. J'ai dû accepter que je n'aurais jamais la même vie que les autres, que je n'avancerai pas aussi vite qu'eux. Que cette maladie faisait partie de moi que je le veuille ou non. J'ai pris beaucoup de force dans ce processus. Et j'ai fait de l'endométriose ma force puisque c'est grâce à elle et à l'élaboration de ma première recette de thé « équilibre féminin » pour les douleurs menstruelles que Niwa Tea à vraiment vu le jour.
D'un point de vue pratique, j’ai fait une demande de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) et pour la création de mon entreprise j'ai été aidée en 2018 par la BGE et l'Agefiph. Deux grandes associations qui mettent tout en ordre pour pouvoir voir grandir les entreprises qu'ils soutiennent. J'ai énormément travaillé seule aussi, car je suis quelqu'un de très perfectionniste.
Comment avez-vous constitué votre dossier pour votre demande de RQTH ?
Oui j'ai fait une demande RQTH. Deux plus exactement, la première m'avait été refusée dans le Gard, après un rendez-vous avec un médecin odieux, qui à l'époque n'avait même pas pris la peine de lire mon dossier et de regarder mes examens. J'avais eu en guise de contact « Bon vous avez quoi vous ? ». J'étais sortie de l'entretien complètement démolie, mais quelques mois après et suite à un déménagement, j'ai refait une demande dans la Haute-Garonne et j'ai été reconnue sans mal RQTH. J'ai constitué les deux fois mon dossier seule, seul mon médecin traitant avait rempli sa part.
Qu'est-ce que cette reconnaissance vous a apporté, vous apporte aujourd'hui et pourrait vous apporter dans le futur ?
Cette reconnaissance m'a apporté beaucoup du point de vue psychologique, je suis malade et je n'ai besoin de le prouver à personne. J'ai le droit de me plaindre et j'ai le droit moi aussi d'avoir les mêmes avantages que les autres. Cela m'a permis aussi d'avoir une aide financière lors de la création de mon entreprise, prise en charge par l'Agefiph.
Que diriez-vous à une personne atteinte d'une maladie chronique qui entraîne des conséquences sur sa vie professionnelle – voire d'endométriose– et qui hésiterait à faire une demande de RQTH ?
J'aimerais leur dire que c'est certainement un chemin jonché d'embûches mais il vaut pas peine d'être parcouru. Il est important aujourd'hui de se battre pour nos droits. Personne ne peut remettre en cause notre parole et nos douleurs. Il n'y a aucune raison pour que ceux qui souffrent ne soient pas traités comme les autres. Nous aussi, nous avons le droit de vouloir un avenir serein. Il faut se lancer faire la demande et recommencer si nécessaire.
Selon vous, comment peut-on améliorer l'accompagnement des personnes atteintes d'endométriose en entreprise ?
La manière la plus simple serait la communication, il y encore beaucoup de messes basses, de non-dits, de fausses informations autour de cette maladie. Les handicaps invisibles souffrent souvent de ce syndrome. Il faut expliquer aux dirigeants, aux collègues de travail, ce qu'est vraiment cette maladie et ce que ça provoque.
Les femmes atteintes auraient moins à se cacher, à souffrir en silence ou à subir des moqueries..
Si vous aviez 1 seul conseil ou une bonne pratique à partager pour mieux concilier maladie (endométriose?) et travail, lequel serait-ce ?
Il faut savoir écouter son corps, croire en ses rêves si on en a et parler du mal qui nous ronge. L'entourage professionnel doit être au courant afin de pouvoir s'adapter au mieux. Il ne faut pas avoir honte de dire « aujourd'hui je ne peux pas mais demain je ferai mieux ».
Merci Pauline pour votre témoignage.
Si vous aussi, comme Pauline vous souhaitez témoigner de votre expérience de l’endométriose au travail, contactez-nous à l’adresse alloalex@wecareatwork.com
Pour toutes vos questions, sachez qu’ALLO Alex est là pour vous aider ! Pour rappel, le service est joignable au 0800 400 310 du lundi au vendredi de 9h à 17h (appel gratuit)
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