Dans nos articles précédents nous abordions la demande de RQTH suite à un cancer. Certaines des personnes qui ont témoigné bénéficient désormais également d’une pension d’invalidité, et dans la continuité des témoignages sur la RQTH, ont souhaité partager leur expérience.
Pour commencer, pouvez-vous nous parler des conséquences de la maladie sur votre travail et des difficultés que vous pouvez rencontrer ?
Véronique : « J’ai eu un cancer du sein en 2017 et je suis toujours en traitement… Les conséquences de l'ensemble de mes traitements me font toujours souffrir et ont un impact certain sur ma vie et ma vie professionnelle. »
Sophie : « Pour ma part, je suis atteinte d’un cancer du poumon à mutation EGFR, sous contrôle grâce à la thérapie ciblée (je n’ai jamais fumé, je suis sportive...) J’ai été diagnostiquée en octobre 2019. »
Mathieu : « Je suis actuellement en rémission d'une leucémie et les médicaments que je prends toujours, pendant cette période dite d'entretien ont malheureusement une incidence directement sur ma forme physique. »
Candice : « J’ai été diagnostiquée en novembre 2017 d’un cancer du sein. J’ai repris le travail à temps partiel un mois après la fin de mes traitements et je suis arrivée au bout mais ne peux le reprendre à temps plein car je n’ai plus l’énergie pour (je suis animatrice en centre de loisirs) »
Elise : « En octobre 2015, j’ai été diagnostiquée d’un cancer du sein. Les conséquences de la maladie sur mon travail ont été une longue descente aux enfers. J’ai été rétrogradée. Du fait du non accompagnement de mon responsable, qui m’a humiliée, fait passer pour une moins que rien… J’ai perdu mes moyens, confiance… Il a cherché à me pousser à la faute voire même à demander mon licenciement pour inaptitude… J’ai eu des pensées très noires et me suis sentie vraiment nulle. Ce fut une période très difficile. J’ai perdu mon poste, été rétrogradée et donc perdu en salaire (enfin en primes) »
Michiko : « J’ai été diagnostiquée d’un cancer du sein en 2014, qui a métastasé en 2017. Lors de l’annonce du diagnostic, j’ai dû quitter mon emploi dans des circonstances très difficiles. Je me suis consacrée à mes traitements. »
Céline : « Je suis en rémission d’un cancer du sein hormonodépendant, Her2+, de grade lll, diagnostiqué en avril 2019, à l’âge de 36 ans. On ne se rend pas compte que la reprise n’est pas simple. Une fatigue énorme, d’importantes difficultés de concentration et de mémoire et de fortes douleurs articulaires m’handicapent au quotidien, à cause des traitements, surtout de l’hormonothérapie. Au travail c’est évidemment démultiplié. »
Vous bénéficiez d’une pension d’invalidité, comment a-t-elle été mise en place ?
Magali : « En juillet 2022, je suis passée en invalidité de niveau 2 étant arrivée au bout de mes trois ans d'indemnités journalières de Sécurité sociale pour l'ALD liée à mon cancer de la peau. C'est la Sécurité sociale qui m'a placée en invalidité 2, étant dans l'incapacité de reprendre le travail pour le moment et de m'éviter une perte de revenu. »
Elise : « Cela s’est fait tout logiquement, à la fin du temps partiel thérapeutique quand la fatigabilité liée aux traitements a été reconnue comme facteur invalidant et qu’une reprise du travail à temps plein n’était pas envisageable. Je travaille désormais à 75% et j’ai une invalidité de 1re catégorie. »
Sophie : « Je ne suis pas à l’origine de la demande. J’ai été convoquée par le médecin conseil de la CPAM avant l’échéance des 3 ans d’indemnités journalières. Le médecin conseil de la CPAM a vu que je touchais des IJSS depuis plus de deux ans, il m’a mise en invalidité quatre mois avant la fin de mes droits aux IJSS (qui légalement ont une durée maximale de trois ans) jusqu’à ma retraite. »
Candice : « J’ai une RQTH jusqu’en 2025 pour le moment. J’ai repris le travail à temps partiel un mois après la fin de mes traitements mais ne peux le reprendre à temps plein car je n’ai plus l’énergie pour ( je suis animatrice en centre de loisirs). Je touchais l’AAH pendant trois ans environ, mais cela a pris fin. Je suis actuellement en recherche d’emploi et je compte faire une demande d’invalidité. »
Céline : « L’invalidité m’a presque été imposée par le médecin conseil de la CPAM. J’ai déclaré un syndrome de stress post-traumatique à la suite des traitements lourds. Ce qui a fait prolonger mon arrêt. Covid aidant j’ai eu le luxe d’une convalescence de deux ans et demi. Le mi-temps thérapeutique étant aussi un arrêt maladie, hors de question de le faire trop durer. Elle voulait me faire reprendre directement en invalidité. J’ai dû mendier pour que ce ne soit pas le cas. Mais finalement, comme j’ai la chance d’avoir une prévoyance au travail, qui complète mon salaire, trois mois après, j'ai fait taire mon orgueil (pas facile d’accentuer la case « handicap ») et je me suis résignée dans mon intérêt. »
Véronique : « C’est le médecin du travail qui m’a préconisé la demande d’une pension d’invalidité auprès du médecin-conseil de la Sécurité sociale, lors de ma visite d’embauche (NDLR. la VIP : la visite d’information et de prévention) au regard de mon dossier médical, de mon âge et de ma vie professionnelle et aussi de ma RQTH. « J’ai effectué la demande sur le site Ameli.fr, c’était simple. J’ai constitué seule mon dossier. Cependant sur les conseils du médecin du travail, j’ai accompagné mon dossier de courriers de mon médecin traitant, du médecin spécialiste et de lui-même. Ces trois courriers sont venus appuyer ma demande lors de ma visite avec le médecin conseil de la CPAM. C’est à l’issue de cette visite que le médecin conseil m’a accordé une pension d'invalidité. »
Mathieu : « Je suis à l’origine de ma demande et ma femme m’a aidé. Au départ c’était pour se renseigner, savoir quels étaient mes droits, à quel montant je pouvais prétendre. La catégorie de niveau 1 pouvait me permettre de réduire mon temps de travail. On a demandé les montants et sollicité un rendez-vous avec la CPAM fin février, une conseillère m’a rappelé quelques semaines plus tard en me demandant quels étaient mes besoins. Je souhaitais dégager du temps pour me reposer, mon état se dégradant de plus en plus les week-ends. Je devais envoyer plusieurs pièces justificatives. C’est important d’avoir un classement des documents, de ses salaires. La Sécurité sociale sollicite la CARSAT pour avoir le relevé de carrière. Le calcul est fait sur les 10 meilleures années. J’allais être mis éventuellement en contact avec le médecin-conseil en fonction des pièces rapportées (ALD, RQTH, comptes-rendus d’examens, de consultations…) « Fin avril j’ai eu la confirmation de mon éligibilité à la pension d’invalidité sans visite avec le médecin-conseil. J’ai reçu par courrier, entre autres, un titre de pension d’invalidité (à conserver précieusement) ainsi qu’une notification m’indiquant le salaire annuel moyen brut (SAMB) et une précision sur le montant mensuel de ma pension en rapport avec ma catégorie de rattachement (30% pour la première catégorie). »
Michiko : « La mise en invalidité a été mise en place suite à la fin de mes droits aux IJSS. J’ai d’ailleurs eu quelques soucis dans les premiers mois car je ne connaissais rien au statut d’invalidité. J’étais pour moi encore en arrêt maladie. À la fin de mon arrêt, mon employeur et moi avions décidé de mettre un terme à mon contrat. Avec le covid, il n’était plus possible le pour moi de reprendre mon poste. La rupture conventionnelle a été un peu compliqué car il y a eu des confusions entre invalidité, arrêt maladie. »
En quoi la pension d'invalidité permet ou va permettre votre maintien ou retour progressif à l'emploi?
Magali : « Initialement j'avais un contrat de 35 heures et je suis passée à 21h hebdomadaires avec la mise en invalidité de niveau 1, ce qui correspondait à 3 jours de travail par semaine. Cela m'a permis de continuer à travailler, même si mon poste a perdu de sa substance : j'ai conservé mon salaire et mon intitulé de poste, mais dans la réalité alors que j'étais manager je n'avais plus d'équipe à gérer. Je l'ai vécu comme une mise au placard, c'était assez difficile. La mise en invalidité de niveau 2 me permet de conserver une compensation de perte de revenu ne pouvant pas reprendre une activité professionnelle pour le moment du fait de ma santé. »
Véronique : « Je suis passée à 80% avec un avenant à mon contrat de travail. Et d’une décision commune avec mes employeurs, je ne travaille plus le vendredi. Je suis très contente de ce nouvel aménagement de temps. Je vais en profiter pour prendre soin de moi. »
Céline : « C’est une vraie chance car cela me permet d’envisager sereinement la suite. Mon emploi d’éducatrice spécialisée en protection de l’enfance ne me correspond plus. Il heurte trop ma sensibilité. Alors grâce à l’invalidité je vais mettre à profit le temps que j’ai pour me former aux thérapies telles que l’hypnose et la PNL. Je pourrai continuer d’aider les autres sans me mettre à mal personnellement. »
Mathieu : « Nous avons fait un avenant à mon contrat. Je travaille désormais 4 jours sur 5, avec une réduction du temps de travail de 8 heures hebdomadaires. Mon salaire a été réduit en conséquence mais est compensé par la perception de la pension d’invalidité. Pour bénéficier de la pension d’invalidité, il y a une règle de cumul à ne pas dépasser avec la Sécurité sociale. Si on la dépasse, le montant de la pension versée peut alors être diminué ou suspendu. La prévoyance peut également être là pour nous aider sur le maintien d’un niveau de revenu équivalent. »
Elise : « En fait, l’invalidité permet le maintien de mon salaire base taux plein. Mais en réalité j’y perds un peu quand même car elle ne compense pas la perte sur les primes ou le 13e mois ou la participation et intéressement que je pourrais avoir si je travaillais à temps plein. J’ai eu du mal, à 35 ans, à avoir l’étiquette invalidité et cela, deux ans après RQTH. J’ai encore du mal à me remettre des conséquences du harcèlement de mon ancien responsable même si aujourd’hui j’ai quelqu’un de bien. J’ai perdu mon poste et c’est assez difficile encore aujourd’hui. »
Merci à Céline, Elise, Magali, Michiko, Sophie, Mathieu et Véronique pour leurs témoignages.
Vous aussi vous souhaitez en savoir plus ou témoigner de votre expérience de la maladie au travail, contactez-nous à l’adresse alloalex@wecareatwork.com
Pour toutes vos questions, sachez qu’ALLO Alex est là pour vous aider ! Pour rappel, le service est joignable au 0800 400 310 du lundi au vendredi de 9h à 17h (appel gratuit).
Comments