La douleur chronique est un symptôme avec lequel il est parfois difficile de composer au quotidien : vie perso, vie pro… Difficile d’agir ou de se concentrer quand la douleur est trop vive voire constante. Celle-ci peut être le résultat d’une maladie, d’un accident, d’une chirurgie ou de traitements. Aujourd’hui nous souhaitons vous parler des douleurs neuropathiques ou neurogènes.
Les douleurs neuropathiques, qu’est-ce que c’est ?
Il s’agit de douleurs liées aux lésions des nerfs ou à une compression de la moelle épinière. On parle de « douleurs neuropathiques centrales » qui peuvent survenir lorsqu'il y a une atteinte du système nerveux central ou de la moelle épinière et de « douleurs neuropathiques périphériques » lorsque c'est le système nerveux périphérique, c'est-à-dire les nerfs qui sont touchés. Les lésions à l'origine des douleurs peuvent être difficiles à diagnostiquer, d'autant plus qu'elles peuvent se situer à distance de la partie du corps douloureuse. De même, si la lésion initiale est guérie, la douleur neuropathique peut subsister.
Ces douleurs peuvent être liées à des complications de maladies telles le diabète ou l'alcoolisme, apparaître dans le cas de certains cancers (lorsque la tumeur se loge au niveau du système nerveux), d'une infection (zona, VIH, hépatite C…), de maladies auto-immunes comme les lupus, de maladies inflammatoires comme la sclérose en plaque ou l'endométriose ou encore lors de certaines maladies qui touchent le cerveau ou la moelle épinière (après un AVC par exemple). Il arrive également que des nerfs, mêmes petits soient lésés par des traitements (anti-cancéreux par exemple), par un traumatisme lié à une blessure ou une fracture (plaie chirurgicale, compression prolongée, amputation, paraplégie…). On parle de « la douleur du membre fantôme » par exemple. La liste est loin d'être exhaustive. Ces lésions peuvent être difficiles à diagnostiquer et les douleurs qui en découlent peuvent apparaître à distance du site douloureux et cela même lorsque la lésion initiale est guérie.
Comment se manifestent-elles ?
Il s’agit de douleurs permanentes ou brèves et intenses qui provoquent des sensations de brûlure, de froid, ou de décharge électrique. Elles peuvent également créer des fourmillements et des picotements, des engourdissements et peuvent survenir ou se renforcer lors d’émotions, de stress, d’efforts physiques particuliers…
Quelles conséquences au travail ?
La douleur peut engendrer des difficultés à effectuer ses activités quotidiennes, qu’elles soient personnelles ou professionnelles. Au quotidien, cela n’est pas que physique, cela peut également impacter la santé mentale (anxiété, irritabilité, dépression, troubles du sommeil et de l’appétit…). Une perte d’énergie, des troubles de la concentration voire de la mémoire peuvent s’ensuivre.
Comment y faire face ?
Ces douleurs nécessitent une prise en charge médicamenteuse adaptée, car elles ne répondent pas aux thérapeutiques habituelles prescrites en cas de douleurs. Les centres de la douleur proposent d’autres approches thérapeutiques afin de soulager les patients (neuromodulation, toxine botulique, chirurgie…). Les soins de support et les thérapies comportementales et cognitives peuvent également aider les patients. Dans l’environnement professionnel, il peut être difficile de déceler des personnes touchées par les douleurs neuropathiques si elles n’en parlent pas. Une sensibilisation à ce type de douleur et les circonstances qui les amènent, peuvent permettre d’anticiper voire de limiter certains contextes propices à leur déclenchement et permettre également une meilleure compréhension et un meilleur accompagnement, et donc une meilleure adaptation de poste du salarié concerné. Pour les patients, la reconnaissance de la douleur neuropathique et du handicap invisible qui en découle est une nécessité.
Jessica témoigne :
« J’ai trouvé difficile de faire comprendre à mon employeur les difficultés que je rencontrais, car mon handicap ne se voit pas, il est invisible. »
Nous sommes heureux de vous partager son témoignage.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre maladie / handicap en quelques mots ?
Je m’appelle Jessica, j’ai 30 ans. En 2019, j’ai échangé ma blouse d’infirmière contre celle de patiente. J’ai subi une lourde chirurgie de la moelle épinière. Je suis sortie de cette opération avec de nombreuses séquelles telles que des douleurs chroniques aux 4 membres et une grande fatigabilité.
Comment avez-vous concilié ces séquelles et votre travail ?
Pour continuer d’exercer mon métier d’infirmière dans le secteur privé, j’ai dû passer en mi-temps et en invalidité de catégorie 1. J’ai aussi changé de service. Avant, j’étais aux urgences, mais les conditions de travail étaient très difficiles et je travaillais sur des journées de 12 h. Je suis partie en salle de réveil, car les conditions de travail étaient plus confortables pour moi : peu de patients, horaires sur des plages horaires de 6 h ou 10 h, nous sommes 5 infirmier•es dans la même salle.
J’évite de travailler deux jours d’affilée, j’ai souvent un repos compensateur après une journée de travail. On adapte mon planning selon mes rendez-vous médicaux.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées ? Qu'est-ce qui vous a aidée ?
J’ai trouvé difficile de faire comprendre à mon employeur les difficultés que je rencontrais, car mon handicap ne se voit pas, il est invisible.
Les journées de 10 h sont très difficiles pour moi. Je suis très fatiguée au bout de 7 h de travail. Il m’arrive souvent d'avoir du mal à rentrer chez moi après avoir travaillé en 10 h. Quand je rentre, je suis vraiment épuisée, mon compagnon prend le relais pour s’occuper de mon fils et de la maison.
Ce qui m’a aidée, c’est la médecine du travail qui m’a énormément accompagnée pour le maintien dans l’emploi en m’écoutant et en adaptant mon poste. Mes collègues aussi m’aident énormément, elles sont bienveillantes et m’aident sur les manutentions et le port de charge.
Selon vous, comment peut-on améliorer l’accompagnement des salariés malades en entreprise ? et plus particulièrement dans le secteur hospitalier ?
Je pense qu’il est capital que les salariés malades soient accompagnés avec bienveillance par leur entreprise.
Il est important de favoriser la communication pour mieux comprendre les besoins du salarié et de mener, auprès des équipes, une politique de sensibilisation afin de limiter les idées reçues et les préjugés liés au handicap.
Suite à votre expérience, vous avez souhaité partager votre expérience sur les réseaux sociaux. Pouvez-vous nous en dire plus ?
J’ai souhaité déconstruire les idées reçues, apporter du réconfort à toutes les personnes qui souffrent de douleurs neuropathiques et leur donner des outils pour mieux vivre leurs douleurs, pour qu’elles se sentent moins seules et mieux comprises. Ces patients doivent faire face aux douleurs omniprésentes, à l'errance médicale, aux effets indésirables des médicaments et aux remarques blessantes. Pourtant, ce mal méconnu touche 5 millions de Français.
Si vous aviez 1 conseil ou bonne pratique à partager avec une personne en situation de maladie / de handicap au travail ?
Reprendre le travail de façon progressive afin de ne pas se mettre en difficulté.
Avec le manager d'une personne concernée ?
Offrir un accompagnement personnalisé avec de nombreux entretiens afin de repérer les difficultés que peut avoir le salarié et proposer un réajustement du poste de travail.
Avec un employeur pour favoriser l'inclusion des personnes concernées ?
Un salarié avec un handicap, n’est pas incapable mais capable autrement. Cibler les compétences plutôt que les limites.
Merci Jessica pour votre témoignage !
Pour en savoir plus, retrouvez Jessica sur Instagram et sur son site internet.
Vous êtes patient ? aidant ? manager ? professionnel des ressources humaines ? Vous aussi, vous souhaitez témoigner de votre expérience de la maladie au travail, contactez-nous à l’adresse alloalex@wecareatwork.com.
Pour toutes vos questions, sachez qu’ALLO Alex est là pour vous aider ! Pour rappel, le service est joignable au 0800 400 310 du lundi au vendredi de 9h à 17h (appel gratuit).
Sources
– HAS : « Prise en charge diagnostique des neuropathies périphériques (polyneuropathies et mononeuropathies multiples) », 25 octobre 2007 [consulté le 7 juin 2023]
– Inserm : « Un nouvel espoir dans la douleur causée par les lésions nerveuses », 6 juillet 2020 [consulté le 7 juin 2023] ;
– Institut Curie : « D’où vient la douleur », 4 juin 2019 [consulté le 7 juin 2023] ;
– Medtronic : « Douleur neuropathique chronique », [consulté le 7 juin 2023] ;
– Vidal : « Douleurs neuropathiques : plaidoyer pour une prise en charge rapide », 21 novembre 2019 [consulté le 7 juin 2023].
Crédit photo : Alice Levêque
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