« Je veux être la patiente partenaire des champs. Je vis en milieu rural loin des établissements de santé et des associations. »
Pour clôturer Octobre rose, nous souhaitions cette semaine mettre en lumière des patientes partenaires référentes en cancérologie. Après le témoignage d’Edith mardi, découvrez aujourd’hui le témoignage de Véronique.
Suite à un cancer du sein, Véronique a quitté son emploi et a choisi de mettre son expérience du cancer au service d’autres patients. Elle nous partage son parcours et ses projets.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre expérience de vie de la maladie en quelques mots ?
J’ai été diagnostiquée d’un cancer du sein à 48 ans, suite à une mammographie de contrôle. Une petite tumeur à l'imagerie. Lors de l'opération deux tumeurs sont finalement retirées, dont une invasive.
Chimio-radio et hormono en cours. J'étais dans un déni total, faisant face à l'injustice : hygiène de vie irréprochable alors pourquoi moi ? J'ai minimisé chaque étape pensant protéger mon entourage familial et professionnel ce qui a été une énorme erreur, car ils n'ont pas pris la mesure de ce que je vivais. Résultat : rupture conjugale, éloignement de mes enfants (jeunes adultes) et rupture conventionnelle.
Comment avez-vous concilié votre maladie, les traitements et votre travail ? Quelles difficultés avez-vous rencontrées ? De quoi auriez-vous eu besoin ?
J'ai pu (en accord avec mon employeur) aller au bureau entre deux cures de chimio quand je me sentais bien. J'ai repris à mi-temps pendant la radio contre l'avis du médecin (L'institut ou je me faisais soigner est à une heure de trajet). Il avait raison. J'ai repris ensuite en temps partiel thérapeutique ce qui fut rapidement incompatible avec mon métier (coordonnatrice dans le transport routier). Les effets indésirables m'ont vite rendu la vie dure. Douleurs, brouillard cognitif, je me suis petit à petit dévalorisée et j'ai perdu confiance en moi : le cercle infernal. J'aurais eu besoin de soutien et d'être prévenue de ce qui m'attendait, besoin d'être reconnue et non pas me mettre la pression pour que tout redevienne comme avant. Je n'étais plus comme avant, je ne savais même pas qui j'étais devenue. Les traitements étaient terminés mais j'allais mal, je n'avais pas retrouvé mon identité physique et je me sentais diminuée, incompétente, fatiguée. J'ai stoppé deux fois l'hormonothérapie, je n'en pouvais plus. Et une amie est décédée après trois récidives alors j'ai repris le traitement et changé de travail. J'ai passé un BTS transport et logistique via une VAE et en parallèle passé mon titre professionnel de formateur d'adultes. J'ai été embauchée au GRETA secteur transport en septembre 2021.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours de patiente partenaire ?
J'ai découvert ce diplôme dans le magazine Rose Up. Je voulais donner du sens à ce qui m'était arrivé, être utile et prévenir les dommages collatéraux. J'ai posé ma candidature à l’université des patients de la Sorbonne pour la formation « Patiente partenaire et référent en rétablissement en cancérologie ». Cette formation a été extraordinaire ! L'équipe d'intervenants est exceptionnelle et j'ai noué des liens forts avec mes pairs. Il y a eu des moments difficiles mais une telle fierté lors de la réussite, de la reconnaissance de cette expertise. Ce mois-ci, j’ai également suivi la master class en éducation thérapeutique (ETP) de formation de l’Université des patients.
Vous avez acquis un savoir-faire et un savoir-être expérientiel en tant que patiente, qu'est-ce que la formation de patiente partenaire à la Sorbonne vous a apporté de plus ?
La formation m'a apporté un regard, une capacité d'écoute, des méthodes, avoir l'expérience de la maladie ne suffit pas, comment puis-je la mettre au service de l'autre sans l'envahir ?
Quels sont vos projets aujourd'hui ?
J'ai obtenu la mise à disposition d'un lieu d'accueil grâce à la mairie de Montmirail et d'un financement. Je veux être la patiente partenaire des champs. Je vis en milieu rural loin des établissements de santé et des associations. Je suis également devenue auto-entrepreneur pour intervenir en entreprise en tant que patiente partenaire afin d'ouvrir la parole et aider à accompagner une collaboratrice touchée par la maladie. Comment puis-je faire en tant que collègue ? Comment gérer ce séisme ? Il y a l'émotion mais aussi les impératifs de l'entreprise. J'ai également écrit une pièce de théâtre sur les maladresses qu'on peut dire autour du cancer, suivie d’un débat. Elle a été jouée samedi dernier et a remporté un franc succès. Le débat qui a suivi fut très riche et les intervenants très impliqués, il y avait : Yann Hummer, directeur des soins de l'institut Jean Godinot, Philippe Chevriot, président de l'APSM, Géraldine Chevalier-Chansel médecin généraliste, et Marie-Paule Vannier, maîtresse de conférence en sciences de l'éducation et consultante en ingénierie pédagogique à l'université des patients de la Sorbonne. Nous avons récolté de l’argent pour l'institut Jean Godinot.
Selon vous, comment peut-on améliorer l’accompagnement des personnes malades au travail ?
En communicant : c'est quoi un cancer ? quels effets ? La fin des traitements ? oui, mais après ? En recueillant les doutes, les peurs des salariés.
Si vous aviez 1 seul conseil ou bonne pratique à partager avec une personne qui souhaiterait faire une formation de patiente partenaire ?
Avoir pris du recul et OSER !
Merci Véronique pour votre témoignage
Vous êtes patient•e partenaire ? Vous souhaitez témoigner de votre expérience ?
Vous êtes patient ? aidant ? professionnel ? vous aussi vous souhaitez témoigner de votre expérience de la maladie au travail, contactez-nous à l’adresse alloalex@wecareatwork.com.
Pour toutes vos questions, sachez qu’ALLO Alex est là pour vous aider ! Pour rappel, le service est joignable au 0800 400 310 du lundi au vendredi de 9h à 17h (appel gratuit).
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